Jean-Pierre Scouarnec : « Être encore plus performants et exigeants que nous ne l’avons été »

Jean-Pierre Scouarnec : « Être encore plus performants et exigeants que nous ne l’avons été »

Publié le 19 mai 2022
Bilans, préparation de la saison à venir en National 1 et état des lieux de la structuration de l'USL Dunkerque, Jean-Pierre Scouarnec, président de la SASSP, se confie et fait le point à quelques semaines de la reprise du groupe professionnel.
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Sur les bilans d’une saison difficile

Président, la deuxième saison dans un championnat pour un promu est souvent la plus difficile. Après deux saisons passées en Ligue 2 BKT, et avec toutes les exigences qui en découlent, quel regard portez-vous sur ces retrouvailles de l’USL Dunkerque avec le monde professionnel après 24 années d’amateurisme ?

Mon regard est très simple. L’ensemble du club a emmagasiné énormément d’expérience par rapport aux exigences du monde professionnel mais, malheureusement, le résultat n’est pas celui que nous souhaitions. Même si nous savions que nous allions jouer le maintien, il y avait de la place pour se maintenir.

Vous l’énonciez, le club a beaucoup progressé, que ce soit sportivement que dans sa manière d’agir et de travailler au quotidien. Est-ce un détail important dans cette volonté de revenir plus fort et de remonter le plus rapidement possible ?

Évidemment et, heureusement, nous avons progressé. Remonter en Ligue 2 BKT sans avoir appris, compris et progressé aurait été inadmissible. Le club s’est considérablement développé dans l’ensemble des services.

En revanche, nous nous devons d’être honnêtes envers nous-mêmes : nous nous sommes trompés sur certains sujets. Je ne parle pas du sportif, je parle de l’entourage. Dès ce moment-là, nous avons eu des soucis cette saison que nous ne devions pas avoir et qui ont, malheureusement, rejailli sur le secteur sportif. Maintenant, commettre ce type d’erreurs fait aussi partie de l’apprentissage. À partir de ce moment-là, on peut s’en vouloir d’avoir fait ces erreurs internes, qui ne sont pas visibles à l’extérieur. Dans le club, en ayant analysé la totalité de la saison, nous savons que nous les avons faites, ces erreurs-là. Nous sommes conscients que nous sommes responsables de la finalité sportive malheureuse de cette saison.

« Être encore plus performants et exigeants » – Jean-Pierre Scouarnec

Quelles sont les leçons à retenir de cette saison difficile ?

Il faut être encore plus performants et exigeants que nous ne l’avons été, et ce à tous les étages du club. Nous montions et nous apprenions ce qu’était le professionnalisme moderne. Nous avons progressé sur de nombreux points mais nous devons encore augmenter le niveau d’exigence et être à 200%.

Sur le sportif et la saison à venir

Aujourd’hui, l’heure des bilans est en grande partie passée. Quels sont les objectifs que l’USL Dunkerque se fixera dès la reprise, en juin, pour la préparation de cette nouvelle saison dans le championnat de National 1 ?

On se posait des questions et, sur certains points, nous savions à peu près là où on pêchait. Ainsi, pour évaluer les manières de travailler et comprendre les problèmes que nous pouvions avoir, nous avons effectué des audits externes. Tout cela est déjà en train d’être mis en place et sera opérationnel pour le début de saison prochaine. Même en National 1, on agira comme des professionnels sur l’ensemble des tâches que peut demander un club : du sportif à l’administratif.

Le plus important, c’est que nous avons une profonde connaissance de ce championnat de National 1 et nous connaissons sa difficulté. Ce championnat est complètement à part dans le milieu du football français. Il y a des clubs pros, des clubs amateurs, des associations et des sociétés. C’est un mélange des genres qui rend ce championnat hétéroclite et très difficile. On sait aussi une chose, c’est que nous n’y allons pas la fleur au fusil en cochant des noms sur une feuille de papier. Nous aurons des joueurs qui connaissent ce championnat ainsi que ses pièges. L’art de cette intersaison sera de faire une équipe de National 1 dans un club professionnel.

Cette longue expérience du National 1, ajoutée aux deux années passées en Ligue 2 BKT, n’est-elle pas une force pour l’USL Dunkerque à l’heure d’attaquer une saison marquée par la mise en place de seulement deux promus… et six relégués ?

Il est évident que nous n’avons pas choisi la meilleure saison pour descendre. La descente ne peut pas être jugée légèrement. Elle est pour l’ensemble de l’agglomération très difficile à digérer et à accepter. Nous sommes aidés par Patrice Vergriete, le président de la Communauté Urbaine et maire de Dunkerque, depuis des années. Nous avons un Tribut neuf et on travaille sur un centre d’entrainement et de formation. On ne le remerciera jamais assez de nous aider comme il le fait et nous ne l’avons pas récompensé avec cette descente. On se doit de s’en excuser et de revenir en National 1 avec humilité, sans prôner que parce que nous descendons, nous serons les meilleurs.

Il reste un objectif : la remontée la plus rapide possible. Durant les deux saisons qui vont venir, il n’y aura que deux montées et six descentes, soit huit clubs sur dix-huit qui vont changer. L’année d’après, d’autres clubs professionnels vont une nouvelle fois descendre. Il est donc bien évident, pour des raisons d’expérience et de calendrier, qu’il faut que nous soyons les plus compétitifs possibles dès le début de cette nouvelle saison. Le club se doit de remonter le plus rapidement possible, tout en terminant sa transformation complète en club entièrement professionnel pour être carré à tous les niveaux et ne plus connaître les difficultés que nous avons connu cette année. Ainsi, l’exigence du sportif pourra, dès lors, être la priorité du club.

Patrice Vergriete et Jean-Pierre Scouarnec

Dans une équipe, l’un des postes les plus importants est celui de l’entraîneur. Cette saison, Romain Revelli, comme l’ensemble du club, a vécu une saison difficile. Pour autant, sa motivation et son envie demeurent intactes à l’heure d’aborder cette nouvelle saison pleine de défis à relever…

On m’a souvent reproché une certaine valse des entraineurs que je ne cesse de nier. Des personnes pensent savoir, mais ne connaissent finalement pas ce qu’il peut se passer à l’intérieur d’un club. Bien évidemment, quand une équipe n’a pas de résultats, l’entraîneur, le staff et les dirigeants sont les premiers responsables. Nous en avons fait les frais, cette saison, avec beaucoup d’insultes durant les rencontres et sur les réseaux sociaux. Ça fait partie du jeu, même si, forcément, on préférerait que cela se passe mieux. Après tout, un seul être humain ne peut être responsable de tout.

Nous avons eu l’occasion de voir et de juger le travail de Romain Revelli dans une situation très difficile. Nous souhaitons jouer la continuité avec lui car c’est plus facile pour travailler et pour monter une équipe. Désormais, il connait le club. Il a également conscience des différents changements que l’on organise et qui seront en place pour le début de saison et il en est très heureux. À partir de ce moment-là, la direction sportive et Romain Revelli vont monter une équipe capable de jouer les premiers rôles en National 1 car nous désirons, je le répète, remonter le plus rapidement possible. Nous mettrons tous les moyens en œuvre pour y arriver.


Romain Revelli

Sur le recrutement

La cellule de recrutement, dirigée par la direction du football et Jocelyn Blanchard, a montré sa capacité à dénicher de jeunes joueurs aux potentiels intéressants, à l’image de Bilal Brahimi, Amine Salama ou encore Enzo Bardeli. Malgré les critiques, les réticences et le manque de résultats, l’USL Dunkerque a montré sa capacité à travailler sérieusement dans le domaine du recrutement.

Ça, c’est une évidence. Quand on voit que l’on prend deux ou trois joueurs pour l’équipe réserve et que finalement, un joueur comme Bilal Brahimi se retrouve à jouer la totalité de la saison et qu’il est un élément important de l’équipe première, c’est une belle réussite.

Mais cela démontre aussi que nous avons souffert d’un déficit de performance de la part de nos cadres. Les jeunes doivent d’abord évoluer avec l’équipe réserve et s’entraîner avec le groupe professionnel pour, à l’occasion, être sur le banc durant des rencontres de l’équipe première. J’ai entendu que nous nous étions trompés dans notre recrutement. Ce n’est pas mon avis car, à mes yeux, les joueurs recrutés ont joué le jeu.

Seulement, nous avons souffert d’énormément de blessures et de bizarreries au sein du vestiaire. Ça a fait le résultat de la saison. Je sais qu’en disant ça, je risque de me faire attaquer. Pourtant, on sait que dans le football, quand tout est réussi, c’est la gloire des joueurs. À l’inverse, quand ça ne marche pas, l’entraineur, le staff et la direction sont responsables. C’est la loi du football et nous l’acceptons. Nous vivons quotidiennement à l’intérieur du club et on sait ce qu’il s’est passé. L’important, ce sont les enseignements que nous tirons et les corrections que l’on va opérer pour cette année en National 1.

Quels sont les axes de travail sur lesquels la cellule de recrutement va travailler pour bâtir cette nouvelle équipe ?

Les axes de travail sont simples : monter une équipe de joueurs de National 1, qui ont de l’expérience, qui sont capables de nous faire remonter le plus rapidement possible et qui correspondent à l’identité de notre club et de notre territoire. Bien évidemment, on va travailler sur les jeunes. Quand on voit qu’on recrute un Bilal Brahimi, avec la saison qu’il a faite, mais aussi Enzo Bardeli ou Amine Salama, ça nous pousse à faire venir des jeunes au club. Cependant, l’objectif ne sera pas de les faire directement jouer avec l’équipe première. On veut qu’ils apprennent, qu’ils s’entrainent avec les pros et qu’ils fassent des apparitions de temps en temps. À un moment donné, ils auront l’opportunité d’y être incontournable.

L’idée première, quand on prend un jeune, n’est pas de l’exposer de manière brutale à un niveau qu’il ne connait pas forcément. Le but, c’est de l’y insérer le plus régulièrement possible pour qu’il s’y adapte. Telle a été la problématique de notre saison. Des joueurs ont été quasiment obligés d’évoluer en Ligue 2 BKT et d’y avoir une adaptation rapide. Quand vous avez joué en National 2 ou National 3 durant la majeure partie de votre carrière, ça peut s’avérer compliqué.

L’objectif du recrutement est donc simple. On veut monter une équipe de National 1 avec des joueurs qui connaissent et qui sont affirmés dans ce championnat, afin qu’ils puissent nous permettre de passer cet écueil. À côté de ça, on veut y accoler de jeunes joueurs qui vont pouvoir se former à leurs côtés et qui pourront, dans le temps, intégrer et s’imposer en équipe première.

Romain Revelli et Jocelyn Blanchard

Sur les soutiens financiers et les partenaires

Président, une relégation n’a forcément jamais rien de « bon » pour les finances d’un club. La Communauté Urbaine, à travers son président et maire de Dunkerque, Patrice Vergriete, va réitérer son soutien à hauteur de ce qu’il était en Ligue 2 BKT. Tribut continuera également d’être l’enceinte historique des Maritimes. Est-ce un message fort que la ville et sa communauté envoie au club ?

Nous connaissons le soutien de Patrice Vergriete pour l’USL Dunkerque. On le remercie particulièrement à nouveau car généralement, quand un club descend, sa subvention baisse. Là, ça ne sera pas le cas. Tribut est le stade historique de l’USLD et nous continuerons d’en être le seul résident. Merci à lui, car Tribut n’est pas encore totalement terminée. J’espère que nous pourrons l’inaugurer fin août, avec un bel événement dont nous aurons bientôt la date exacte. C’est gratifiant pour un club sportif, quel que soit son niveau et son résultat, de pouvoir bénéficier d’un soutien sans faille du président de l’agglomération et maire de Dunkerque.

L’USL Dunkerque peut également compter sur ses fidèles et nombreux partenaires qui, depuis de nombreuses saisons et particulièrement en Ligue 2 BKT, n’ont cessé de soutenir et de supporter le club. Quel message souhaitez-vous leur adresser à l’heure de digérer la relégation et d’attaquer, tous ensemble, ce prochain gros défi ?

Leur tristesse et leurs interrogations peuvent être légitimes. Je les comprends totalement puisque je suis moi-même partenaire, en tant que président. Nous sommes tous tristes de ce qu’il nous arrive. L’idée principale, c’est de rebondir le plus rapidement possible et de le faire, aussi, grâce à eux. On compte sur eux comme nous avons pu le faire précédemment. Ils ont été là et ont vécu, comme nous, des moments difficiles. Ils n’ont pas vu beaucoup de victoires et le plus beau des spectacles car, de nos jours, le sport est aussi un spectacle que nous devons proposer. Charge à nous, maintenant, de leur proposer de nouveau de revivre des émotions et d’être le plus heureux possible lors de leur venue à Tribut.

Sur les relations avec les clubs locaux

Cette saison, le club a souhaité se rapprocher encore un peu plus des clubs locaux. Plusieurs opérations ont été mises en place : invitations aux rencontres de Ligue 2 BKT, échanges techniques entre les éducateurs de l’USLD et leurs homologues ou encore le récent partenariat avec l’US Bray-Dunes pour l’organisation de la Yount’che Kup. Est-ce important, pour vous, Président, ainsi que pour le club et tout ce qu’il représente d’être proche des clubs qui l’entourent ?

On est le club leader du Dunkerquois et de l’agglomération. On se doit d’être auprès des autres clubs mais, et c’est important : sans être un donneur de leçons. Nous devons être là pour travailler avec eux main dans la main et pour faire en sorte que leurs meilleurs joueurs rejoignent l’USL Dunkerque. Les échanges qui se font, en matière d’organisation ou de terrains, doivent être gagnants-gagnants sans que personne ne se soit lésé.

Je pense qu’il suffit de revenir 26 ans en arrière. Le club était en deuxième division et le positionnement des clubs de l’agglomération était plus élevé qu’il ne peut l’être aujourd’hui parce que, justement, des joueurs sortaient de l’USLD et avaient une formation plus étoffée grâce au centre de formation. Ils venaient ainsi renforcer les clubs locaux et permettaient de les faire jouer à un étage supérieur.

Ça, il faut impérativement que nous le retrouvions et avec humilité. Cette saison de National  1, hormis la volonté de remonter le plus rapidement possible, doit être aussi la finalité pour le club de terminer sa structuration interne, tant d’un point de vue structurel que sur l’ensemble des plans qui touchent au club. L’USL Dunkerque pourra demeurer comme un vrai club professionnel et bénéficier de son centre de formation qui, à terme, permettra aux clubs voisins de grandir aussi grâce à cette jeunesse qui viendra finalement de chez eux et que nous aurons tenté d’accompagner jusqu’au plus haut niveau. Nous grandirons avec nos clubs voisins et partenaires.

Sur les supporters et les Dunkerquois

Cette saison, le public dunkerquois a eu énormément de mal à revenir à Tribut. Finalement, cette redescente en National 1 qui, certes, n’était pas dans les plans du club, ne peut-elle finalement pas permettre de repartir de zéro et d’embarquer, tous ensemble et main dans la main, vers nos nouveaux objectifs ?

Il est vrai que l’affluence de Tribut n’a pas été excellente cette année. Seulement, les résultats sportifs, le passe sanitaire, la Covid ou encore la fin des travaux de rénovation en pleine saison n’ont pas aidé. C’est un constat, pas une critique. Nous espérons, en jouant les premiers rôles la saison prochaine, faire revenir les supporters à Tribut pour qu’ils puissent voir l’équipe jouer le haut du tableau avec des résultats à la maison qui seront cohérents avec les objectifs qui sont fixés. Maintenant, nous aurons certainement un début délicat car il faudra redonner confiance aux supporters pour qu’ils reviennent. Le seul moyen de le faire, c’est d’obtenir des victoires avec la manière.

« On veut redonner confiance aux supporters et aux Dunkerquois » – Jean-Pierre Scouarnec

Cela fait partie de notre travail : montrer aux supporters et aux personnes qui aiment le football à Dunkerque que la saison de National 1 sera très intéressante et qu’il faudra être à Tribut pour la vivre. Cela ne passera qu’avec des résultats. On veut leur redonner confiance en leur équipe de foot. J’arrive à comprendre que venir à Tribut et voir les rencontres qu’on a vues au cours de la saison n’était pas une sinécure. L’objectif qu’on se fixe, d’être dans le haut du tableau et d’y rester tout au long de la saison, doit permettre de redonner confiance à nos supporters et de les faire venir encore plus nombreux à Tribut.